La diffusion d’œuvres en ligne : études de cas dans le spectacle vivant
Lors du 3ème Forum Entreprendre dans la culture en Nouvelle-Aquitaine, qui s’est déroulé intégralement en ligne les 12 et 13 novembre 2020, la Région a proposé une table ronde portant sur la diffusion des œuvres en ligne.
Depuis les années 2000, les pratiques des publics ont fortement évolué vers les nouveaux usages (écoute en ligne de musique, abonnement aux plateformes de cinéma et audiovisuel, médias en ligne, nouveaux formats adaptés aux réseaux sociaux, nouvelles formes immersives…). La crise sanitaire est venue renforcer et accentuer cette tendance rendant indispensable la réflexion sur des formes de diffusion complémentaires aux traditionnelles co-présences artistes/publics dans des lieux physiques.
Au-delà de l’impact du numérique sur la question artistique, cette table ronde a été l’occasion d’aborder des questions très opérationnelles (juridiques, économiques, techniques) que pose la diffusion d’œuvres du spectacle vivant sur Internet sous ses différents modes : live, replay, formats dits interactifs.
Nous vous proposons de voir ou revoir cette table ronde via le replay ci-dessous que nous avons choisi d’accompagner de contenus ressources supplémentaires sur les sujets abordés par nos intervenants.
Le replay de la table ronde
Index des interventions
- 7min15 : Vidéo d’exemple de diffusion en différé
DROITS D’AUTEUR ET DROITS VOISINS
- 8min43 : Y a-t-il une différence de traitement des droits d’auteur pour des œuvre en ligne ?
- 10min55 : la définition des droits d’auteur et droits voisins
- 14min17 : la gestion des droits d’auteur
- 20min15 : la rémunération des droits d’auteur, notamment par les plateformes de diffusion de contenus en ligne
- 28min48 : la protection de son œuvre en ligne
TECHNIQUES DE CAPTATION
- 31min00 : la captation comme restitution/témoignage d’une œuvre versus la captation qui fait œuvre
Exemple : « Body and soul » de la Cie Crystal Pite
UNE EXPÉRIENCE AUGMENTÉE
- 37min40 : présentation du projet EAT SCAN né de la volonté de prolonger l’expérience live grâce au numérique
- 44min42 : vidéos d’exemple de diffusion en direct
DROITS D’AUTEUR ET RÉMUNÉRATION DES ŒUVRES DIFFUSÉES SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX
- 46min14 : les spécificités de gestion et de rémunération des droits d’auteur lors d’une diffusion sur les réseaux sociaux
RESSENTIS DES ARTISTES FACE À L’URGENCE D’UNE DIFFUSION EN LIGNE LORS DU CONFINEMENT
- 49min34 : retour d’expérience de Brice Perrochon, accompagnateur d’artiste à l’Agence Kulte
- 52min25 : retour d’expérience de Jérémy Galliot, accompagnateur d’artiste à la Fédération Hiéro Limoges
- 55min28 : les possibilités du numérique qui font que le live peut devenir du différé.
ALTERNATIVES AUX MODÈLES ÉCONOMIQUES CLASSIQUES DE DIFFUSION EN LIGNE
- 56min42 : présentation du projet GAIAR
- 59min40 : la technologie blockchain
- 1h11min45 : vidéo d’exemple de diffusion interactive
LES ATTENTES DU PUBLIC EN LIGNE
- 1h13min55 : les attentes de qualité de diffusion
- 1h17min12 : dépasser la captation témoignage grâce aux technologies numériques
- 1h19min05 : les différences entre le public en ligne et le public en présentiel
- 1h21min03 : ces nouveaux usages qui poussent à se différencier
- 1h22min30 : la diversification des sources de rémunération pour les artistes
- 1h25min03 : la présentation du projet de plateforme pour les professionnels du spectacle vivant portée par l’agence Kulte
QUESTIONS
- 1h28min50
Les intervenants et leurs projets
Olivier Ramoul, avocat au cabinet ORA-PAJDA
Avocat à la cour de Bordeaux, et auteur d’un guide juridique des plasticiens, Olivier Ramoul est aussi le Président de la Fabrique Pola, tête de réseau des arts visuels en Région Nouvelle Aquitaine.
Le cabinet d’avocat ORA PAJDA a accompagné les projets de plus de 3000 artistes et structures culturelles, ainsi que d’entrepreneurs tous secteurs confondus de l’économie sociale et solidaire, partout en France.
Il conseille, assiste et accompagne dans les activités professionnelles de créateurs, auteurs, producteurs, éditeurs, collectivités publiques, structures privées.
Il intervient dans la structuration juridique et fiscale, la définition et la contractualisation des relations professionnelles, notamment dans des domaines d’activité relatifs au droit de la propriété intellectuelle, au droit des sociétés, au droit commercial, et au droit du travail. Enfin le cabinet ORA PAJDA assure la défense des acteurs culturels devant les tribunaux dans les domaines relevant de sa compétence.
Jérémy Galliot, chef de projets à la Fédération Hiero Limoges
Jérémy Galliot a un parcours professionnel et personnel qui lui a permis de voir les musiques et la culture à travers de nombreux prismes : production, médias, centre ressource, enseignement, musicien amateur.
Depuis 2008, il anime aussi des temps de formations « Diffuser des œuvres musicales en ligne : mode d’emploi et questions de droits ».
La Fédération Hiero Limoges est une association née en 1997 du regroupement d’acteurs musiques actuelles. Œuvrant pour contribuer au développement culturel, social et artistique des musiques et pratiques culturelles actuelles (concert, accompagnement, info-ressource, action culturelle), les usages numériques s’imposent à elle. Elle développe une application « EAT SCAN » prolongeant l’expérience vécue pendant les spectacles par la mise à disposition de contenus additionnels exclusifs via le billet.
Le service Numérique culturel vous propose de découvrir le projet EAT SCAN, lauréat de l’appel à projet Cultures Connectées, à travers une vidéo interactive réalisée à l’occasion de l’expérimentation de ce dispositifs le 14 février 2020 au Sans Réserve à Périgueux :
Wilhelm Bérard, CEO et Delphine Rieu, gestionnaire des contenus de gaiar.com
Wilhelm Bérard fut technicien, directeur de la photographie, réalisateur, scénariste et producteur audiovisuel avant de fonder gaiar.com. Fort d’une expérience de 20 ans dans ce secteur d’activité, il réunit une équipe de professionnels tous issus de la culture, des techniques audiovisuelles et de l’informatique. GAIAR répond ainsi à une problématique : augmenter significativement les revenus des ayants droit d’œuvres numériques sur internet.
Delphine Rieu est co-fondatrice de GAIAR, et s’occupe de la gestion des contenus et de la communauté GAIAR. Autrice de bande dessinée, éditrice chez Eidola éditions, adhérente à divers syndicats et groupements d’auteurs, elle est attachée au droit moral et patrimonial.
GAIAR est une plateforme pluridisciplinaire qui permet d’héberger, de gérer et de diffuser des œuvres quelque soit leurs domaines. Que vous soyez auteurs professionnels ou amateurs, producteurs, éditeurs, labels, distributeur, etc. vous pouvez déposer des œuvres sur la plateforme.
GAIAR utilise la technologie blockchain reconnue juridiquement comme tiers de confiance, dans le respect du droit d’auteur.
Pour plus d’information, vous pouvez télécharger la plaquette de présentation de GAIAR ci-dessous.
Romain Grandchamp, producteur – réalisateur, le 400 Tiers Lieu
En charge des projets audiovisuels et numérique au sein du Tiers Lieu Le 400 à Brive-la-Gaillarde, Romain travaille depuis plus de 10 ans sur des projets artistiques et muséographiques mêlant création audiovisuelle et numérique.
Par ailleurs producteur pour différentes sociétés de production audiovisuelle et réalisateur de contenus, ses compétences vont de l’accompagnement à la réalisation technique, le pilotage et la coordination des équipes créatives tout en assurant le suivi budgétaire des projets.
Plus de travaux menés avec le 400 à voir sur leur chaîne Viméo.
Brice Perrochon, directeur de l’Agence Kulte
Brice Perrochon est co-fondateur de l’agence Kulte qui, depuis 2018, accompagne les collectivités, entreprises, fondations & associations dans leurs projets de créations événementielles en Nouvelle-Aquitaine et région parisienne.
Cela fait bientôt 15 ans que Brice Perrochon a choisi pour métier l’événementiel après des études en communication publique et politique à Bordeaux. En parallèle de son intervention sur des grandes manifestations de la ville de Bordeaux, comme Bordeaux Fête le Vin ou la Fan Zone de l’Euro 2016, son action s’est essentiellement portée sur des événements à dimension culturelle et artistique comme Imaginez Maintenant Bordeaux, les deux éditions d’Evento, le FAB ou encore Jazz à la Base.
L’agence Kulte va lancer au dernier trimestre 2021, une plateforme qui proposera un programme hybride de développement et de rayonnement de la scène créative de la Nouvelle-Aquitaine : NOA CRÉATIVE.
La plateforme proposera des contenus pour le grand public avec 4 scènes ouvertes dans 4 villes partenaires ou se produisent groupes ou compagnies sélectionnées en live, des performances diffusées en streaming avec interviews et autres contenus, et 4 séries interactives à travers lesquelles on suit le processus de création d’artistes jusqu’au jour de leur performance.
Mais aussi des espaces pour les professionnels avec un salon virtuel où se rencontrent artistes, producteurs et diffuseurs autour de stands et conférences où qu’ils se trouvent sur le territoire de la
Nouvelle-Aquitaine et la possibilité de communiquer, découvrir et « booker » grâce à un profil personnalisé (biographie & son/vidéos, références, programmation, fiches techniques…).
Pour plus d’information, vous pouvez télécharger la plaquette de présentation de NOA CRÉATIVE ci-dessous.
FAQ – questions/réponses
Jérémy Galliot : « Netflix, Youtube, Dailymotion et sûrement plein d’autres. »
Delphine Rieu : « Concernant GAIAR, nous sommes encore en version beta, donc les discussions pour des accords n’ont pas encore commencé. »
Jérémy Galliot : « La SCAM gère les droits pour les auteurs de podcasts. Pour ce qui est des musiques diffusées, c’est la plateforme de diffusion (Deezer – Spotify – Apple Podcast – Youtube…) qui règle auprès des sociétés concernées les droits d’auteurs et droits voisins. Dans les faits, pour être moi-même podcasteur, jamais une plateforme ne m’a demandé la liste des œuvres diffusées pour rémunérer les ayants droit donc soit ils utilisent la technologie du fingerprint pour reconnaitre les morceaux comme le fait Shazam©, soit ça tombe dans des répartissables, soit ça n’est pas rémunéré. »
Delphine Rieu : « Comme pour toutes les œuvres déposées sur GAIAR, ils sont gérés via le smart contract. »
Olivier Ramoul : « Pour les auteurs, il y a des accords avec la SACD, la SACEM, la SCAM, pour les interprètes, il s’agit de contrat de gré à gré avec les producteurs. »
Jérémy Galliot : « Reconnaissance oui, car référencement. »
Delphine Rieu : « Sur GAIAR les hashtags (mots clés), que le déposant aura associé à ses œuvres, sont référencés sur les moteurs de recherche, comme Google, de même que le nom de sa chaine sur GAIAR. Ainsi l’œuvre monétisable est facilement trouvable grâce aux hashtags. »
Olivier Ramoul : « Pour Instagram, par exemple, la propriété des contenus demeure à l’artiste auteur, mais en signant la licence vous acceptez l’utilisation desdits contenus sur cette plateforme. Les utilisateurs ne peuvent utiliser ces contenus sauf accord de l’artiste auteur. Votre rémunération résultera des accords passés avec la SACEM. Ainsi pour Facebook, des accords ont été passés couvrant les activités de Facebook, Instagram, Messenger et Oculus.
Pour les artistes interprètes, la question est plus délicate puisqu’il n’y a pas d’accord actuellement avec les sociétés de gestions collectives qui les représentent. »
Jérémy Galliot : « Les solutions comme les tweetwall le permettent, y compris en multiplateforme, en voici un exemple français : fr.interactive-wall.com »
(La question a été posée par un théâtre privé de 100 places.)
Romain Grandchamp : « Difficile question… On ne peut pas répondre pour savoir si cela « en vaut la chandelle », cela dépend bien sûr des capacités d’investissement, de rentabilité, de l’attente du public…
L’équipement audiovisuel pour assurer une retransmission des spectacles de « qualité » à en effet un coût important. Nous parlons ici d’un minimum de 2 à 3 caméras pouvant travailler en basse lumière, d’une régie technique de montage (en direct ou non), de compétences humaines pour faire fonctionner le tout…
Mais cela ne suffit pas. Pour attirer un nouveau public, si tant est qu’il y en ai un, il va falloir valoriser ce contenu, l’insérer sur les réseaux, le faire vivre, le mettre en forme, le penser et l’inscrire dans une communication claire. Cela prend aussi du temps et des compétences (celle d’un Community manager par exemple ou d’un responsable communication).
Le coût est peut-être plus maitrisé en faisant appel à une équipe de captation pour certains spectacles ? Mais nous abordons ici des questions de coût vs rentabilité qui débordent du sujet… et pourtant…
La transformation digitale inévitable ? Non, je ne pense pas. En revanche le numérique est là et on ne peut pas faire comme s’il n’existait pas.Peut-être que le numérique et la captation peuvent être envisagés de façon plus légère et en créant plutôt du « contenu augmenté » ? En créant par exemple des capsules autour des spectacles ou des répétitions, des interviews des artistes à proposer sur les réseaux…? Voir l’exemple de l’application de la Fédération Hiero « EAT SCAN » ?
Et puis n’oublions pas, nous parlons de spectacle vivant, espérons que le tout digital ne vienne pas remplacer les spectateurs et la rencontre avec le public physique. »
Jérémy Galliot : « Il faut dimensionner au projet, à l’heure d’aujourd’hui les expériences montrent que peu de gens sont prêts à payer pour du spectacle en direct en ligne pour l’instant. »
Romain Grandchamp : « Créer un clip en live c’est à dire en direct ? Et bien faites appel à votre créativité :), il y a plein de manière de faire du contenu créatif en ligne et en direct.
Si la question porte plutôt sur la captation en direct comme celle de Mathieu Chedid, il y a du matériel et de la technique derrière. Il n’est pas seul face au direct de Facebook :).
On peut ainsi brancher sur un « mélangeur vidéo » ou des « cartes d’acquisition vidéo » plusieurs entrées de caméra, une console de mixage, le tout relié à une régie de montage en direct et envoyer le tout en streaming sur les réseaux. Sans oublier de travailler son décor, ses lumières et sa mise en scène.
Quelques petits logiciels comme « switcher studio » offrent aussi des solutions un peu plus abordables avec des téléphones ou iPad connectés ensemble et sur lesquels on peut brancher une console de son externe pour les instruments… »
Jérémy Galliot : « On met un groupe sur scène, une demi-journée pour préparer les lumières, la scénographie. Une demi-journée de tournage, où ils jouent 5 ou 6 fois le morceau soit au métronome, soit en playback, dans différentes configurations et, à partir des prises, un montage est fait.
Voici 3 exemples tournés avec un seul vidéaste à un tarif abordable (moins de mille euros, hors rémunération des artistes) à la salle Des Lendemains Qui Chantent : Dirty Rodeo – Weird Omen – Mr Godson ».
Romain Grandchamp : « Grâce au service Numérique culturel de la Région 🙂
Non sinon… en tapant société audiovisuelle + région Nouvelle-Aquitaine dans Google 🙂 ?
Mais l’important dans la question est « du matériel et des personnels compétents » et là c’est extrêmement subjectif en fonction du rendu souhaité et du budget alloué. Le mieux est de toujours regarder les réalisations de ces dites sociétés pour juger de la qualité du travail. »
Jérémy Galliot : « Voici une piste pour la Nouvelle-Aquitaine, je suppose qu’il y a un pôle régional du film dans pas mal de régions : ALCA. Sinon, regarder une vidéo qui vous plaît puis les crédits. »
Delphine Rieu : « Oui bien sûr, toute œuvre culturelle a sa place sur GAIAR. Sur la prochaine version nous aurons une sous-catégorie dédiée au documentaire dans la partie audiovisuel. »
Delphine Rieu : « Nous sommes hébergeurs, tout le monde est libre de poser du contenu (comme sur YouTube ou Viméo). Nous nous assurons juste que les œuvres respectent le cadre de la loi.
Il n’y a pas de choix éditorial, les œuvres apparaissent à la une de manière aléatoire. »
Delphine Rieu : « Nous prenons 1 euro pour le dépôt de propriété intellectuelle puis 15% sur toutes les transactions financières. À savoir que le 1 euro est le tarif pour la beta. Il y aura ensuite une évolution avec des abonnements, mais toujours dans le souci d’équité pour l’artiste. »
Delphine Rieu : « Tout type de contenu artistique peut-être déposé. Plus la durée de l’œuvre sera longue et sa qualité haute, plus le fichier sera lourd, plus le temps de chargement sera long, il faudra donc une bonne connexion à celui qui pose le fichier, et ensuite à celui qui regarde l’œuvre.
Actuellement il n’y a aucune limite, mais elle viendra avec la mise en place des abonnements. Il est coûteux d’héberger et diffuser des fichiers lourds, donc cela aura évidemment une répercussion sur le coût. Mais encore une fois, il y aura plusieurs solutions proposées, pour être toujours au plus près des besoins des artistes. »